Le mot de notre Président d’honneur et fondateur
André DUMONT
Chers amis,
C’est une grande joie pour Maud et moi de participer à cette assemblée générale qui fête les 60 ans de notre fédération chorale ACJ Wallonie-Bruxelles, d’autant qu’il se tient sur le site du Bois du Cazier à Marcinelle où nous résidons depuis 1950.
Je suis toujours séduit par l’éloquence de Suzanne et conforté par l’engagement sans faille qu’elle manifeste pour notre mouvement ACJ dont elle est fondatrice en 1959.
Je salue très cordialement chacun et chacune d’entre vous et tout particulièrement mes amis de longue date Thierry Thiébaut et Jean-Marc Poulin.
Je remercie chaleureusement Monique Alexandre, présidente de la Régionale de Charleroi, et Anne-Marie Mazy, la secrétaire, ainsi que toute l’équipe pour l’organisation de cette journée anniversaire.
Je remercie tout spécialement Eric Deprez, chef de chœur de la Pastourelle de Charleroi, qui organise ici depuis 2012 le Festival International ACJ de Chorales, ce qui nous a ouvert les portes du site du Bois du Cazier.
Ce site classé au patrimoine culturel mondial de l’Unesco est le symbole de l’industrie charbonnière de notre pays, mais aussi la cause de son déclin après l’incendie qui l’a ravagé le 8 août 1956 en faisant 273 victimes.
Le 8 août 1956 se tenait à Vaison-la-Romaine les 2e Choralies du mouvement ACJ. Au concert du soir, dans le théâtre antique, César Geoffray est monté sur la scène. Il a dit : « Nous avons parmi nos invités la chorale La Pastourelle de Charleroi. Dans cette ville, aujourd’hui, une catastrophe minière a tué 273 mineurs. En pensée avec leurs familles et leurs proches, je vous demande un moment de recueillement. » Dans un grand silence, le théâtre s’est levé.
César a dit : « Je vous remercie » et est sorti de la scène. Moment intense d’émotion inoubliable.
Tous les ans, je reçois le programme des activités de notre fédération. Je suis à chaque fois étonné par le nombre des activités qui concernent aussi bien les chefs de chœur que les choristes de tous âges, chacun pouvant y trouver, à son niveau musical, une raison d’y participer.
Chaque régionale prend en charge une activité majeure :
- à Bruxelles, à Bozar en concert, une œuvre magistrale chantée par le Chœur régional dirigé par un chef de talent,
- en Brabant wallon, le rassemblement du 1er mai ouvert aux enfants et aux adultes,
- à Liège, le rassemblement du 11 novembre,
- à Charleroi, le festival international des chorales,
- à Mons, la découverte en concert d’une œuvre inédite de la Renaissance,
- à Namur, le festival « Namur en Chœurs » où les chorales font chanter notre capitale.
Sans oublier :
- le camp musical des enfants
- les WE pour les jeunes à la Marlagne
- les sessions de formation tous niveaux
- la Librairie Musicale
- la semaine chantante internationale à Kos.
C’est cette richesse d’activités renouvelées d’année en année et l’accès pour tous sans condition partisane ou religieuse qui nous vaut d’être reconnus, appréciés et consultés par les services du Ministère de la Culture, quelque soit le Ministre en charge.
Nous devons, vous devez être fiers de notre fédération qui associe aujourd’hui 220 chorales.
Il est vrai que notre région, favorisée par sa situation géographique en Europe, bénéficie des cultures latines, germaniques et anglo-saxonnes qui se côtoient et s’expriment dans de nombreuses manifestations musicales.
Notre fédération, en créant les événements Europa Cantat, Europa Cantat Junior, Europalias, a multiplié les rencontres de chorales européennes et la venue de ses meilleurs chefs.
Notre fédération est aussi co-fondatrice d’ACJ International, d’Europa Cantat et de la Fédération Internationale pour la Musique Chorale.
Dans toute construction, chaque pierre a son importance. Toutefois, c’est sur les pierres angulaires que repose l’édifice.
Il me plaît de citer aujourd’hui, à l’occasion de notre 60e anniversaire, les pierres angulaires sur lesquelles s’est construit notre mouvement ACJ depuis sa fondation en 1959 : Ferdi et Suzanne Boonen, Yvonne Loves, Paul Sartiaux, Marie-Liliane Delvaux, Raymond Chardome, Marie-Thérèse Devoever, Marie-Claude Remy, Etienne Malherbe, Georges David, Manu Poiré, Yves Wuyts, Marie-France Bouvy et notre président Noël Minet.
Pour témoigner de notre reconnaissance vis-à-vis d’eux, je vous demande de les applaudir.
Je souhaite que cette assemblée générale qui fête notre 60e anniversaire soit riche et féconde de projets et de décisions pour que chante encore et toujours ACJ en 2019.
Le mot de Suzanne BOONEN-MOREAU, fondatrice
Parmi les fondateurs, nous sommes encore deux, André Dumont et moi, présents aujourd’hui, sûrement pas pour vous promener dans un cimetière, ni encoremoins vous ouvrir le grenier des vieux souvenirs, mais pour nous réjouir, avec vous, contempler les vigoureuses et belles moissons des semences que nous avons plantées il y a 60 ans et écouter la musique de tous les vents du monde qui les ont fait chanter !
Fêter un anniversaire, ce n’est pas se retourner pour compter les années qui nous ont portés jusqu’aujourd’hui, mais c’est regarder devant nous l’immensité de l’avenir, espoir de tous les possibles et imaginer, aider, pousser, encourager tous ceux qui vont pouvoir prcourir les chemins au bord desquels nous nous arrêtons pour leur passer le relais.
Nous ne sommes pas des survivants mais des témoins, les témoins directs des premières heures d’un « temps A Coeur Joie » que l’âge des anciens n’a jamais voulu ralentir.
Nous avons fréquenté et côtoyé ses initiateurs, César Geoffray et son équipe d’animateurs, d’organisateurs, de penseurs, de constructeurs, musiciens ou non, qui ont ému, enthousiasmé, mobilisé toute une jeunesse française d’abord, mais dont les voix ont rapidement passé les frontières et, aujourd’hui, je dois vous dire ma fierté et ma reconnaissance envers vous tous et vous féliciter chaleureusement : non seulement vous n’avez jamais trahi le message qui n’était pas que musical mais aussi humain, fraternel et merveilleusement libre des premiers élans, mais vous l’avez amélioré, multiplié, élargi, varié, fortifié au gré d’une évolution incontournable, mais surtout grâce à une volonté, à un effort de qualité qui fait de nos chorales des joyaux de créativité musicale, d’imagination artistique et d’exigence partagées dans une démarche universelle d’amitié et de compréhension.
Car c’est cela A Coeur Joie : ce n’est pas un alignement de choristes, c’est une véritable entreprise éducative et culturelle réunissant toutes les générations, qui passe allègrement à travers tous les progrès techniques, numériques, scientifiques, médiatiques, en les accueillant, en les maîtrisant et en les apprivoisant, sans rien abandonner de ses ambitions artistiques, universelles et humanistes.
C’est pour cette raison que je veux, j’ose, je prétends adresser aux jeunes que vous êtes un appel pressant :
Vous sentez bouger plus que jamais le monde où vous vivez; le temps semble s’accélérer, poussé par les incroyables performances scientifiques et technologiques que votre génération est en train de réaliser.
Sur terre, dans l’air et dans l’eau, les véhicules vont circuler de manière autonome; on vous proposera des voyages sur la lune, sur Mars ou d’autres planètes, des machines dotées d’intelligence artificielle avec une mémoire dont la capacité dépasse la nôtre vont articuler l’organisation du monde autour de leurs prouesses; des robots bienveillants ou dangereux vont vous donner l’impression de penser et de décider à votre place.
Vous allez devoir essayer de maîtriser d’immenses tableaux de bord aux centaines de boutons indifférents, pour naviguer dans un monde dont on vous répète que ce qui lui permet aujourd’hui de réaliser des exploits extraordinaires, va aussi, demain, le conduire à sa destruction et à sa perte !
Alors, n’hésitez pas à vous engager, à vous mobiliser, à prendre des responsabilités, des initiatives, des postes de gestion et de direction dans des activités comme la nôtre, qui mettent l’art, la rencontre, l’amitié, le respect au centre de leurs préoccupations, autrement dit, qui sauvegardent l’humain au coeur du monde, sa liberté, son esprit et sa puissance d’amour.
« Devant les menaces diverses afférentes à une société arrivée au paroxysme de la puissance matérielle, nous devons garder en nous, pour en assurer la transmission alentour, le respect et la fidélité à des principes sans lesquels rien ne dure, nous devons nous souvenir, conserver les vraies valeurs qui permirent aux sociétés successives de mûrir lentement leur fruit : l’homme. Bref, nous garder des illusions de bonheur attachées au progrès machiniste, à l’abondance qui en découle, à la vitesse. Rester ouverts aux saisons, à la nuit, au silence, à l’enfant, à l’amitié, à la musique tout particulièrement, nous qui aimons le chant choral : notre humanisme s’appuie avant tout sur des principes d’amour … car la fréquentation de la musique, de la forêt ou de la mer est, à elle seule, une facteur considérable d’affranchissement…
Nous sommes ouverts à tous les hommes de bonne volonté d’où qu’ils viennent et nous voulons avec eux, dans la confiance échangée et le respect des convictions personnelles, chanter notre JOIE car malgré la dureté de notre temps, la joie demeure encore … »
César Geoffray, Musique vivante, 1965
Dans le monde A Cœur Joie International
Assemblée Générale de la Fédération Chorale Wallonie-Bruxelles
A Cœur Joie, samedi 16 mars 2019 à Marcinelle.
Soixantième anniversaire.
En ce samedi 16 mars 2019, nous avons eu l’honneur, Marguerite et moi, de représenter A Cœur Joie Suisse à l’Assemblée Générale marquant le 60e anniversaire de la fondation d’A Cœur Joie Belgique — devenue la Fédération Chorale Wallonie-Bruxelles (FCWB) A Cœur Joie.
L’événement se déroulait dans le cadre extraordinaire du Bois du Cazier, à Marcinelle-Charleroi, ancienne mine de charbon devenue un musée et un mémorial de la catastrophe qui a coûté la vie à plus de 260 mineurs le 8 août 1956. Une façon de faire se côtoyer deux histoires ayant marqué la Belgique : celle d’une industrie appartenant désormais au passé, et celle d’une aventure musicale qui n’a cessé de se développer depuis 1959 en Belgique, sous l’impulsion d’André Dumont et de quelques autres, dont Suzanne Boonen Moreau, le tout en relation évidemment avec le mouvement choral initié en 1940 par César Geoffray, et qui s’est répandu dans le monde francophone dès la fin de la seconde guerre mondiale.
Cette journée fut l’occasion, outre la partie formelle et protocolaire de l’Assemblée, d’entendre quelques témoignages de pionniers d’ACJ Belgique, et surtout de mesurer le dynamisme de cette fédération, débordante de projets, dont beaucoup portés par des jeunes (chefs, choristes, administrateurs) à l’enthousiasme réjouissant. Un exemple : au moment de renouveler une partie du conseil d’administration, les 3 candidat-e-s qui se présentaient étaient tout juste trentenaires, ont fait une forte impression et ont été largement élus.
De quoi réjouir le président Noël Minet, toujours efficace, et bienveillant pour ses administrateurs, surtout pour les jeunes appelés à prendre le relais.
A Cœur Joie en Belgique aujourd’hui, c’est quelque 230 chorales (pour un réservoir de moins de 5 millions d’habitants francophones), ce qui en fait la principale organisation chorale de Wallonie-Bruxelles. Les diverses activités et formations sont proposées soit sur le plan fédéral, soit par les régionales (il y en a sept). La palette en est riche et variée, s’adressant aussi bien aux adultes qu’aux jeunes et aux enfants, aux choristes qu’aux chefs et administrateurs. Il suffit d’aller se promener sur le site www.acj.be pour s’en convaincre. La FCWB A Cœur Joie est reconnue et soutenue par le gouvernement, ce qui lui permet de financer un secrétariat professionnel.
Soixante ans, cela ne pouvait pas passer inaperçu, et nos amis belges ont fait les choses de manière à la fois grandiose et digne. Notamment en donnant la parole à deux des fondateurs de la fédération, ce qui a été un moment extraordinaire en émotion, parce que tant André Dumont (92 ans) que Suzanne Boonen (82 ans) n’ont évoqué certains souvenirs que pour mieux parler d’avenir, de projets, de souhaits pour la jeune génération !
Quel bel exemple nos amis wallons ont montré, en ce jour de célébration, démontrant que l’idéal du mouvement lancé voici plus de 70 ans par César Geoffray est plus actuel que jamais dans son fondement, même si la forme a évolué, s’adaptant à l’évolution de notre société.
Cette journée ne pouvait pas se terminer sans musique, et le chœur de la Régionale de Charleroi nous a offert un superbe concert consacré à « La Suite Duteil », sous la parfaite direction d’Arianne Plangar et de Bénédicte Willems.
Un grand merci à la FCWB A Cœur Joie pour cette magnifique journée et pour son dynamisme, que, personnellement, j’aimerais retrouver dans toutes les fédérations qui composent A Cœur Joie International. Que ce soixantième anniversaire ne soit qu’une étape de plus dans une aventure encore pleine de projets innovants, tels sont mes vœux !
Jean-Marc Poulin – président d’honneur ACJ Suisse ■